René Une vie

Au centre de cette autobiographie se trouve un juif non pratiquant qui connaît six ou sept langues, qui cultive de nombreux centres d’intérêts, qui laisse flâner son esprit sans le cantonner à un seul domaine, et qui flâne toujours avec sa bibliothèque portable sur Kindle. Un banquier international et un entrepreneur en série qui a résisté aux brusques changements politiques, sociaux et moraux : ce qui l’a souvent sauvé, c’est une ironie perspicace. L’ironie ou l’art de se moquer des dissonances, des enchevêtrements, des paradoxes ou des absurdités qui pavent le chemin des hommes.

La vie de René de Picciotto, avec ses constantes régénérations affectives et professionnelles, avec ses émotions, ses sentiments, ses chutes et ses rebondissements à travers quatre-vingts ans d’histoire, ponctuée de rencontres avec des personnages parfois intrigants comme Maria Callas ou le roi Farouk d’Égypte. Partout on trouve une trace, un sillon, une étincelle capable d’éveiller l’envie d’être vivant, ne serait-ce que par la confrontation avec ce qui a été et ce qui est, dans l’attente de ce qui sera, dans un monde angoissé par des questions apparemment sans réponse.

On en revient, après tout, au mythe d’Énée, qui porte sur son dos son vieux père Anchise et tient la main de son fils Ascagne : transposition moderne d’un personnage soumis au poids écrasant du passé et à l’incertitude de l’avenir.